La Française des Jeux lance Creatio, un jeu de grattage en ligne

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La Française des Jeux a inauguré officiellement lundi 21 février 2011 un nouveau jeu de grattage exclusivement disponible en ligne.

Baptisé Créatio, ce jeu permet de gagner jusqu’à 16.000 € avec une mise maximale de 2 €. L’internaute peut également miser des sommes de 0,5 et 1 €.

Le principe du jeu consiste à choisir une roue virtuelle parmi quatre éléments : Terre, Eau, Feu ou Air. Si une somme en euros s’affiche, le joueur remporte le montant indiqué. Si le segment Chance apparaît, le joueur peut alors relancer la roue sans avoir à remiser d’argent.

3 Commentaires le La Française des Jeux lance Creatio, un jeu de grattage en ligne

  1. martignoni le 07/04/2011 á 18:58

    Gambling France : Française des jeux, incitation au jeu, jeu responsable, éthique, responsabilité sociale de l’entreprise

    CRESCENDO, CREATIO , MOTS CROISES, MILLE BORNES,2° TIRAGE POUR EUROMILLIONS … : LES MULTIPLES NOUVEAUX JEUX DE LA FRANCAISE DES JEUX

    LA POLITIQUE DE JEU RESPONSABLE DE LA FRANCAISE DES JEUX MASQUE UN ACTIVISME COMMERCIAL FORCENE
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    Jean-Pierre G. Martignoni-Hutin ( sociologue)

    • Après avoir lancé « Crescendo » en novembre 2010 et « 2011 année de rêve » en décembre, la Française des jeux (FDJ) a commercialisé « Mots croisés » en février 2011 et quelques jours après « Créatio », un jeu de grattage disponible uniquement sur internet. Depuis, la FDJ a lancé « Mille Bornes », un jeu qui n’est pas donné par les temps qui courent (5 euros) et elle annonce un deuxième tirage pour Euromillions à partir du 10 mai 2011 alors que le Loto compte déjà trois tirages hebdomadaires (lundi, mercredi, samedi)

    • Christophe Blanchard Dignac ( PDG de la Française des jeux) peut se réjouir, ses équipes marketing font preuve d’une imagination débordante pour lancer en permanence de nouveaux « jeux » et notamment des jeux de grattage. Peut-être faudrait-il d’ailleurs parler de « produits », de « coups marketing » tant l’intérêt ludique de ces jeux paraît parfois restreint. Il s’agit en réalité de faire le plus d’argent possible le plus rapidement possible en jouant, coté joueur sur la tentation du « je vais essayer au moins une fois », coté médias sur « le buzz de la nouveauté. Agences de presse et médias jouent en effet un rôle considérable dans ces lancements en reprenant pro domo les nombreux « communiqués de la FDJ » (nonobstant les budgets publicitaires considérables qui accompagnent ces lancements). Le fait que par ailleurs la FDJ « arrose » en permanence de ses publicités de nombreux journaux ( locaux et nationaux) et organes d’information ( radio, télé), favorise objectivement ce curieux prosélytisme ludique opéré gratuitement par les médias à chaque nouveau jeu de la FDJ. La directrice de la communication de la FDJ (Laetitia Olivier) ne cache pas qu’elle doit jongler entre des métiers très différents dont « influence ( lobby, presse) » ( cité par Stratégie .fr du 27 janvier 2011)

    • L’opérateur historique avait déjà surperformé en 2010 (+5,5 %) en dépassant pour la première fois la barre symbolique des 10 milliards. Avec une telle politique, l’opérateur « publique » atteindra facilement le taux de croissance de 3% qu’il s’est fixé pour 2011 et sans doute le dépassera-t-il. Mais de tels résultats ne tombent pas du ciel. Ils proviennent de « l’activisme commercial » de la FDJ. Christophe Blanchard Dignac court donc le risque de subir des critiques pour « cette incitation au jeu particulièrement prononcée », alors qu’il affiche par ailleurs une politique de jeu responsable.

    • Ainsi, certains esprits chagrins pourraient accuser le PDG de la Française des jeux de surfer et même d’exploiter sans vergogne une crise économique qui perdure. Les Français en grande difficulté financière cherchant plus que jamais à « décrocher le pactole » pour « changer de vie » , « se refaire », ou tout simplement pour essayer « d’améliorer l’ordinaire ». Un ordinaire de plus en plus affecté par l’augmentation des prix, la dépression économique mondiale, l’ imposition fiscale locale et nationale en perpétuelle augmentation ; sans oublier l’arrivée inflationniste de l’Euro dont nos concitoyens ne se sont toujours pas remis. Conscient de cette situation ( parfois dramatique pour les catégories populaires et désormais aussi pour les classes moyennes) CB Dignac exploiterait sans le dire, la théorie de la pauvreté de certains économistes spécialisés dans le gambling : plus on est pauvre plus on joue.

    • D’autres pourraient soupçonner le « patron » de la Française des jeux de n’avoir guère l’esprit public, de ne pas avoir le sens de l’intérêt général, mais d’agir en réalité, comme « la pire des entreprises privées », exploitant jusqu’à la corde dans une vision courtermiste, un précieux patrimoine ludique national qui ne lui appartient pas, contribuant ainsi à « tuer la poule aux œufs d’or » de Bercy, tout en piétinant sans vergogne un « principe de précaution » longtemps instrumentalisé pour freiner l’ouverture à la concurrence et combattre les directives européennes. Même si elle a depuis retourner sa veste ( et d’une belle manière) la FDJ a longtemps mis en avant sa politique de jeu raisonnable et responsable pour tenter de prouver que la meilleure façon de lutter contre le jeu pathologique était de maintenir le monopole, qui existe encore en matière de loteries et de jeux de grattage.

    • Mais c’est justement sur ce terrain du jeu responsable, du jeu pathologie maladie, de la responsabilité sociale de l’entreprise Française des jeux (RSE), que Christophe Blanchard Dignac pourrait en final être montré du doigt, mis en accusation et en contradiction, et cela sur trois registres

    1/ Le premier concerne la « dangerosité » des jeux que vend l’opérateur historique à travers un réseau très dense de distributeurs (35800) Le chercheur Jörg Häfeli a établi « un instrument d’évaluation du potentiel de dangerosité des jeux de hasard et d’argent » (1) Parmi les critères qui le définisse on trouve notamment :
    ➢ Le critère de disponibilité : la probabilité accrue de développer un comportement de jeu problématique est directement lié à la disponibilité d’un jeu
    ➢ Le critère du degré d’interactivité : dans certains jeux « le joueur est émotionnellement impliqué », » il vit à fleur de peau la façon dont se prépare l’issue du jeu » . J. Häfeli précise « on observe cela pour les loteries dont le tirage s’effectue en direct à la télévision «
    ➢ Le critère de mise sur le marché : une mise sur le marché à grande échelle entraine une banalisation du jeu. Cette normalisation favorise l’excessivité. La routine se substitue à la réflexion critique précise par ailleurs deux autres chercheurs Meyer & Hayer ( 2005)
    ➢ Le critère de l’anonymat : le potentiel de risques de jeu excessif s’élève avec le degré d’anonymat d’un jeu car le joueur ne craint aucune stigmatisation. L’anonymat supprime l’effet modérateur du contrôle social induit dans le fait de déclarer son identité, comme par exemple quand on joue dans un casino. En outre cet anonymat rend plus difficile la prévention, précise J. Häfeli.

    Contre toute attente on s’aperçoit que ces critères correspondent exactement aux caractéristiques des jeux de la FDJ, notamment des loteries et des jeux de grattage. Les jeux de l’opérateur historique possèdent objectivement un potentiel addictogène important et ne correspondent pas à une offre « douce ». A l’avenir et notamment si l’Observateur des jeux fonctionne comme un véritable Observatoire scientifique et non comme une simple Commission ( voir ci-dessous), la FDJ devra faire avec des instruments d’évaluation objectifs et ne pourra plus définir elle même la dangerosité ou l’innocuité de ses produits. Les jeux considérés comme les plus dangereux étant avant tout dans l’imaginaire du joueur freudien véhiculé par la doxa du jeu pathologie maladie ( financée par la FDJ), les jeux de casino (roulette, black-jack, machines à sous, poker) et les paris hippiques.

    2/ Le deuxième registre concerne plus largement les études sur le jeu. La Française des jeux essaie depuis deux ans ( avec une accélération depuis la libéralisation des jeux en ligne) de verrouiller entièrement le volet « recherche sur le jeu pathologique ». Elle finance le centre du jeu excessif de Nantes à hauteur de deux millions d’euros sur 8 ans, soit la bagatelle de 13,11 millions de nos bons vieux francs. La FDJ est le « partenaire fondateur » du centre de Nantes. Ce n’est pas pour rien et ce n’est pas hasard qu’elle a fondé ce centre, auto proclamé centre de référence sur le jeu excessif. Sans la FDJ il n’existerait pas. La Française des jeux vient par ailleurs soudainement de verser 270 OOO euros à deux universités parisiennes pour verrouiller un volet plus large gambling & sciences sociales. Christophe Blanchard Dignac instrumentalisant à cette occasion certaines conclusions de l’expertise Inserm, qui invitaient les pouvoirs publics ( et non les opérateurs !) à mener des recherches sur les jeux d’argent et à installer un Observatoire des jeux. La également les circonstances et les raisons de ce « financement parisien » soudain sont loin d’être clairs. Ne parlons même pas de l’enquête sur « le caractère addictif des jeux en ligne » réalisée par MM. Ladouceur/Lejoyeux à Bichat et financée également par la FDJ. Les conflits d’intérêts semblent se cumuler dans le champ ludique vu que Michel Lejoyeux fait partie dans le même temps de la Commission n° 1 de l’ARJEL. Quant au psychologue cognitiviste Robert Ladouceur ses rapports incestueux avec Loto Québec ( qui se chiffrent en millions de dollars canadiens) ont été dénoncés depuis des lustres ( 2) et les résultats de ses études sur le jeu pathologique ont été critiqués. Il y a bien au niveau de la recherche sur le jeu la mise en place par Christophe Blanchard Dignac d’un « Plan B », sans Comite consultatif du jeu et sans Observatoire. La Française des jeux finançant la quasi-totalité des études en cours sur les jeux d’argent, nonobstant « sa commande à l’AFNOR », visant à auto définir la notion de « jeu responsable » pour mieux la contrôler. Toutes ces actions et tout cet argent engagé par l’opérateur des loteries ont pour but de cour-circuité l’Observatoire des jeux, avant même que celui ci ne soit installé et sans doute même au départ pour qu’il ne soit jamais installé. La FDJ est bien entendu en conflit intérêts jusqu’au cou dans cette affaire. Christophe Blanchard Dignac continue avec de gros moyens financiers son travail de verrouillage pour occuper tout le terrain : financement de la doxa du jeu pathologie maladie, communication permanente, instrumentalisation des agences de presse et donc des médias sur la question du jeu responsable… On est visiblement face à un plan stratégique parfaitement concerté. Certes depuis le 11 mars 2011 l’Observatoire des jeux (ODJ) a été installé. Mais sa composition semble pour l’instant confirmer les craintes que nous avons exprimées dans différentes contributions ( 3 ). A savoir que les que les pouvoirs publics cèdent à la tentation de mettre en place de manière délibérée un Observatoire « croupion » Actuellement ( la qualité des personnes n’est pas en cause) l’Observatoire des jeux ressemble davantage à une Commission, à un COJER bis, qu’à un Observatoire scientifique des jeux de hasard. Chacun en conviendra. L’ODJ apparaît en outre strictement mono-disciplinaire et centré uniquement sur le jeu pathologie maladie. Pour remettre les compteurs à zéro en matière de recherches sur le jeu il aurait fallu dès le départ ( et après plus d’un an d’une curieuse attente !) doté l’observatoire de moyens qui soient à la hauteur des enjeux scientifiques et statistiques du secteur, c’est à dire avec un budget au moins aussi important que celui de l’Observatoire des drogues. Au lieu de ça « le cabinet » nomme Jean Michel Costes à l’Observatoire des jeux ( la également la qualité, et en l’occurrence vu le cumul des fonctions, les nombreuses qualités de la personne ne sont pas en cause) qui est déjà… directeur de l’Observatoire des drogues.
    3/ Nous l’avons vu la FDJ en fait beaucoup en matière de jeu responsable mais elle en fait sans doute trop. Et cela nous permet d’aborder le troisième registre sur lequel le PDG de la Française des jeux pourrait être mis en contradiction, voire en accusation. Nous pensons que cet engagement en matière de RSE cache une autre réalité. La politique jeu responsable de Christophe Blanchard Dignac serait beaucoup moins éthique qu’elle veut bien le dire, elle aurait pour fonction de cacher un activisme commercial & marketing forcené. La FDJ met en avant depuis deux trois ans une politique des jeux raisonnable, « finance ses ennemis » (les anti jeu de la doxa du jeu pathologie) pour mieux les contrôler mais dans le même temps se lance dans une course effrénée à la croissance, jamais vue depuis sa création. En final la politique éthique mis en œuvre par CB. Blanchard Dignac aurait pour conséquence en réalité – sous couvert d’une action visant à lutter contre le jeu excessif et le jeu de mineur – de produire plus de jeu. Habile stratège le patron de la FDJ aurait profité du débat sur le jeu pathologique, de l’inquiétude des pouvoirs publics en matière de santé publique, non pas pour mettre la pédale douce en matière de développement mais au contraire pour accélérer sa croissance tout azimut.
    Si notre hypothèse se vérifiait cela voudrait dire que la politique de jeu responsable mis en œuvre par CB Dignac des deux dernières années va produire en final… du jeu pathologique ! Les meilleures preuves de cette démonstration se situent dans les résultats de l’opérateur de loteries. Si la FDJ a réussi contre toute attente en pleine crise économique à augmenter son CA c’est parce qu’elle a très fortement boosté son offre de jeux en ligne et surtout en dur et qu’elle continue à le faire à marche forcée ( voir début de l’article). Dans une moindre mesure un phénomène similaire a été observé pour le PMU à tel point que certains joueurs s’inquiètent désormais pour savoir si on n’a pas atteint un point de saturation en ce qui concerne le nombre de courses en France. (4) Cette très forte augmentation de l’offre du PMU a été signalée par Hubert Monzat ( directeur de France Galop) lors du colloque du 22 mars dernier à la Maison de la Chimie ( 5)
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    Certes certains pourront considérer que le PDG de la FDJ – responsable mais pas coupable – n’est après tout qu’un grand commis de l’Etat qui fait très bien son travail et remplit avec zèle les caisses du Trésor Public. Reste à savoir de quelle marge de manœuvre CB Dignac a disposé dans cette affaire et si elle n’a pas été trop grande justement. Reste à savoir si la politique des jeux de la France doit se décider à Bercy ou dans la forteresse de Boulogne (siège de la FDJ). Reste à savoir si les excès de zèle du patron de la FDJ et de ses équipes, sa politique expansionniste, sa boulimie ne sont pas en contradiction avec la Politique des jeux responsable affichée par le gouvernement depuis quelques années, et inaugurée par Nicolas Sarkozy avec les casinos quand il était Ministre de l’Intérieur ( notamment mise en place d’un contrôle aux entrées obligatoire pour les machines à sous). Dans tous les cas de figure en termes de santé publique et de RSE, l’effet boomerang serait terrible pour les pouvoirs publics. Ils seraient accusés d’incompétence, pire de duplicité.
    D’autres considèreront que ce n’est pas un problème de personne et que les vraies questions sont les suivantes : « L’industrie des jeux de hasard et d’argent est elle compatible avec les notions de jeu responsable et de développement durable ? « ( Martignoni 2010), « Comment réussir à concilier une politique responsable de développement des activités de jeux ? » ( Peano 2010) « L’éthique dans l’industrie du jeu, quels enjeux et quelle crédibilité ? « (Massin 2010) , « La gestion des jeux de hasard et d’argent : une perspective éthique ? « (6) Ces problématiques, certains chercheurs spécialisés dans le gambling les posent depuis longtemps. La puissance publique pourrait s’en inspirer. Quant à la question du financement par l’industrie du jeu de la recherche sur le jeu excessif (une convergence d’intérêts primaires qui entraîne un conflit intérêts que la Française des jeux connaît bien) la également les chercheurs ont travaillé la question (Hurst, Mauron , 2010) (7) Monsieur Blanchard Dignac pourrait peut être également s’en inspirer. Potius sero quam numquam*

    © JP Martignoni , avril 2011

    * Mieux vaut tard que jamais

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    Notes
    (1) Jörg Häfeli : « Un instrument d’évaluation du potentiel de dangerosité des jeux de hasard et d’argent » (75-91) In C. Dunand, M. Rihs-Middel, & O. Simon (Eds.), Prévenir le jeu excessif dans une société addictive : D’une approche bio-pscho-sociale à la définition d’une politique de santé publique. Genève : Éditions Médecine & Hygiène., 2010

    (2) Pierre Desjardins : « Le livre noir de Loto Québec « ( Les intouchables Montréal, Québec, 2003)

    (3) JP Martignoni : « Il ne faut surtout pas que l’Observatoire soit un Observatoire croupion »* (IGAmagazine n°9, avril 2011, 42-45) ; Communiqué sur l’observatoire des jeux de hasard et d’argent annoncé par un arrêté du 11 mars publié au journal officiel ( 13 mars 2011) ( 2 pages, 21 mars 2011)

    (4) Isabelle Toussaint : « Hippisme : trop de courses tue les courses « ( dépêche AFP du 12 mars 2011)

    (5) « Les jeux d’argent en ligne : un an après son adoption quelle mise en œuvre de la loi sur la libéralisation des jeux d’argent en ligne « (Colloque Agora Europe organisé par JF Lamour et F. Trucy, Paris, Maison de la Chimie, 22 mars 2011)

    (6) JP Martignoni : L’industrie des jeux de hasard et d’argent est-elle compatible avec les notions de jeu responsable et de développement durable ? : intérêts, contradictions et enjeux » ( 226-232) Valérie Peano : « Comment réussir à concilier une politique responsable de développement des activités de jeux avec une industrie globale de plus en plus performante ? (233-237) Sophie Massin : « « L’éthique dans l’industrie du jeu, quels enjeux et quelle crédibilité ? « (213-218)Magali Brodeur : « La gestion des jeux de hasard et d’argent : une perspective éthique ? « ( 219-226) Ces quatre article se trouvent dans l’ouvrage collectif : C. Dunand, M. Rihs-Middel, & O. Simon (Eds.), Prévenir le jeu excessif dans une société addictive : D’une approche bio-pscho-sociale à la définition d’une politique de santé publique. Genève : Éditions Médecine & Hygiène., 2010

    (7)Samia A. Hurst, Alex Mauron : « Financement industriel de la recherche et conflits d’intérêts », (241-248) ibid. : C. Dunand, M. Rihs-Middel, & O. Simon (Eds.), Prévenir le jeu excessif dans une société addictive : D’une approche bio-pscho-sociale à la définition d’une politique de santé publique. Genève : Éditions Médecine & Hygiène., 2010

  2. martignoni le 07/11/2011 á 17:58

    LES TROIS PARADOXES DE LA POLITIQUE DES JEUX FRANCAISE

    ➢ Jean-Pierre G. Martignoni-Hutin ( sociologue)

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    La clause de revoyure de la loi sur les jeux en ligne, qui arrive à échéance le 13 novembre, doit être l’occasion pour le gouvernement de faire le point sur sa Politique Des Jeux et permettre aux autre acteurs du champ de débattre sur les multiples enjeux de cette politique, comme vient de le faire la dernière livraison de la revue Pouvoirs (1) Comme l’ont précisé différents rapports récents (2) – et notamment celui du Sénateur Trucy (3) – il s’agissait davantage par cette législation, de réguler une activité illégale existante, que de libéraliser de manière sauvage la totalité du marché ludique. Les internautes peuvent désormais – dans la légalité – jouer au poker en ligne, parier sur les courses hippiques ou de nombreux sports, tout en étant « presque » certains de ne pas se faire duper sur des sites mafieux. L’affaire Full Tilt Poker – une salle de poker virtuel accusée par la justice Américaine d’être une chaîne de Ponzi – indique en effet que la surveillance des opérateurs virtuels ne constitue pas une mesure liberticide, mais favorise au contraire le gambling virtuel. L’article du patron de la Police des jeux – Jean-Pierre Alezra – dans la Revue française d’études constitutionnelles et politiques déjà citée, souligne bien que la révolution des jeux par internet et la mondialisation ludique favorisent « les dérives criminelles » de l’ensemble du secteur. (4)

    La politique des jeux française : défendre un double intérêt national, public et privé

    La « modernisation » de la Politique Des Jeux de la France, inaugurée par Nicolas Sarkozy avec les casinos quand il était Ministre de l’intérieur et qui a abouti à cette fameuse loi du 12 mai 2010, apparait à un premier niveau comme un succès, quoiqu’en disent ses détracteurs. L’accusation des « amis du Fouquet’s » – vs jeux d’argent – a fait long feu. Si certains « amis du Président » ont « profité » de cette loi dite « d’ouverture maitrisée à la concurrence », les deux opérateurs historiques (FDJ et PMU) sont loin d’avoir été lésés, bien au contraire. C’est en réalité un double intérêt national – public et privé – et la volonté de se mettre à jour vis-à-vis des directives et injonctions européennes, qui ont prévalu dans les choix gouvernementaux, après de nombreux « arbitrages », un gros travail parlementaire et sénatorial, ensemble qui souligne que la France n’est pas une République Des Jeux… bananière.

    Trois paradoxes

    Néanmoins, pour passer d’une politique d’intérêt national – qui peut paraître protectionniste et contradictoire à certains égards – à une politique d’intérêt général, trois paradoxes devront un jour ou l’autre être levés.

    ➢ Le premier paradoxe c’est celui bien connu d’Etat Croupier. Chacun le reconnaît le gambling qui traîne une symbolique sulfureuse ancienne liée à son histoire, doit être contrôlé, surveillé, réglementé pour éviter toute tricherie et de nombreux autres dérives ( blanchiment…). C’est ce que fait l’Arjel pour les jeux en ligne, la Police des jeux pour les casinos et les courses… Le problème quand l’Etat est croupier c’est, d’une part que la réglementation peut être perçu comme de l’auto régulation, d’autre part que les règles ne sont pas les mêmes pour tout le monde. L’autorité publique peut avoir tendance à privilégier l’opérateur dont il est l’actionnaire majoritaire. L’opérateur historique de son coté va avoir tendance à faire comme bon lui semble. Plusieurs autres volets de la politique des jeux vont avoir du mal à être mise en place de manière cohérente et crédible, à cause de cette double casquette portée par l’Etat.

    ➢ C’est le cas par exemple de la politique de jeu responsable qui entraîne un deuxième paradoxe. Dans le cadre du projet de loi sur les jeux en ligne, les pouvoirs publics ont fortement accentué leur politique de jeu responsable (information/ prévention, numéro vert, lutte contre le jeu excessif, le jeu des mineurs, les interdits de jeu….) et le discours public sur cette thématique. Soucieux de santé publique, et afin de répondre aux attentes européennes de protection des joueurs, ce concept de jeu éthique a néanmoins été fortement instrumentalisé par certains professionnels de l’addiction – en conflits d’intérêts dans cette affaire. Fondamentalement cette politique de jeu responsable apparaît rapidement en contradiction avec la libéralisation partielle des jeux en ligne, nonobstant la croissance accrue des jeux en dur opérée dans le même temps par la FDJ et le PMU ces dernières années, avec une très forte accélération ces derniers mois. Ce paradoxe a été souligné avec vigueur par l’autorité de la concurrence dans son Avis du 20 janvier 2011, « Ainsi, la lutte contre l’addiction au jeu entraîne nécessairement la recherche d’une limitation de la consommation, et partant, de l’offre de jeux, alors que le droit de la concurrence vise à stimuler la concurrence pour améliorer les conditions de vente d’un produit ou service et en faciliter l’accès le plus large possible au consommateur ».

    ➢ Dernier paradoxe celui d’un libéralisme ludique qui – contradictoirement – serait principalement basé sur la réglementation et la fiscalité. A cause des deux paradoxes cités avant, l’autorité publique et la représentation nationale ont crû bon de manière préventive, de fortement réglementer et fiscaliser les jeux en ligne. La critique de la réglementation est bien connue, elle n’a jamais été démentie : trop de réglementation peut tuer la réglementation et peut même tuer le business. Idem en matière de fiscalité. Conscient de cette réalité, et face aux résultats financiers moins bons qu’attendus, les principaux responsables du dossier veulent désormais « rendre plus attractifs » les jeux en ligne en jouant notamment sur une baisse de la fiscalité, mesure revendiquée et soutenue par les professionnels du secteur. Ce à quoi Valérie Pégresse, vient de répondre que face à un dossier aussi complexe et qui met aussi en cause la fiscalité des jeux en dur, la définition du PBJ… il fallait mener « un travail complémentaire approfondie » (5) qui vient d’être confié à Jean François Lamour. Au delà de son aspect technique très complexe, une question simple doit être posée : « dans une économie de marché l’économie d’un marché » – ici le marché ludique sur internet – doit-elle être régie par la fiscalité, la réglementation ou en laissant jouer la libre concurrence, la loi de l’offre et de la demande. Cette problématique de la régulation économique du secteur des jeux la classe politique dans son ensemble devra un jour y répondre franchement.

    Chemin de Damas ou chemin de Croix liberticide ?

    Il y a sans doute plusieurs chemins pour aboutir à une bonne sécurité des jeux en ligne et à une « saine » fiscalité… qui n’entrave pas le commerce du jeu virtuel ou en dur. Assurément, à cause de son orientation (6) et des 49 recommandations qu’il contient, le « rapport d’évaluation » que vient de remettre la Ministre du Budget au Gouvernement (7) va faire couler beaucoup d’encre (8). Souhaitons que les décideurs politiques en charge du dossier trouvent rapidement leur chemin de Damas, pour ne pas que l’aventure ludique des jeux en ligne se transforme en chemin de Croix liberticide. L’ensemble des acteurs du secteur devraient d’ailleurs aborder ces différents registres de manière sereine, car en final le succès des jeux de hasard en ligne – comme celui des jeux d’argent en dur – dépendra largement de l’environnement macro économique. Par ailleurs les protagonistes du champ concerné ont tous un intérêt commun. Ils souhaitent – comme les joueurs qui s’engagent dans l’aventure ludique – « remplir leur bougette »(9).

    © JP Martignoni , Lyon, France, novembre 2011, 189.

    Notes

    (1) Pouvoirs n° 139, Revue française d’études constitutionnelles et politiques, Les jeux d’argent, novembre 2011, 164 pages, Editions du Seuil
    (2)Celui d’Aurélie FILIPPETTI et de Jean-François LAMOUR, celui de l’Afjel (Association Française du jeu en ligne) , celui de l’Arjel ( Autorité de régulation des jeux en ligne)
    (3)Rapport d’information n°17 , Sénat, 12 Octobre 2011, 315 pages
    (4) JP Alezra & Véronique Degermann, ibid. Pouvoirs n° 139, Revue française d’études constitutionnelles et politiques, 103-118
    (5) « Taxation des jeux en ligne : pas de réforme, mais une mission à M. Lamour « ( message AFP du 21 octobre 2011
    (6) V. Pécresse : maintenir la fiscalité actuelle sur les jeux en ligne « ( dépêche AFP du 25 octobre 2011)
    (7) « Ouverture à la concurrence et à la régulation du secteur des jeux d’argent et de hasard en ligne » (Rapport d’évaluation du Gouvernement , loi n° 2010-476 du 12 mai 2010, octobre 2011, 71 pages)
    (8) Mathilde Visseyrias, » Jeux en ligne : le régulateur veut assouplir la fiscalité, L’Arjel craint une recrudescence des sites illégaux si les autres continuent à perdre de l’argent, Le Figaro, 3 novembre 2001,23.
    (9) Ancien mot de la langue française désignant une bourse ou un coffre ou l’on met de l’or. Après avoir voyagé, notamment en Angleterre, ce mot nous est revenu sous le terme Budget.

  3. Anim S. le 19/04/2012 á 17:45

    Alors que les cartes à gratter telles que nous les connaissons aujourd’hui ont été inventées il y a environ 40 ans de cela, il est possible de rattacher leur origine à des formes de jeux beaucoup plus anciens qui demandaient aux joueurs de deviner correctement une certaine série de nombres pour gagner. Les jeux de grattage gratuits s’adressent à tous les fans de grattage gratuit en ligne qui veulent s’initier aux jeux de grattage sur internet pour le plaisir et connaître des sensations fortes en grattant des tickets virtuels.

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